Le 5 août 1850, Louis Napoléon Bonaparte
promulguait une loi visant à instaurer des Centres d'Education
et de Patronage
pour jeunes détenus.
Quelques temps plus tard, le 17
février 1858, Le
comte Henri de Pourtalès achète un domaine sur l'île du Levant (commune
d’Hyères,
Var) et
décide d'y établir une colonie agricole et
pénitentiaire. Ce sera chose
faite en 1861.
Le pénitencier agricole
fonctionnera avec un
effectif variable de 200 à 300 jeunes détenus. Il fermera
ses portes en 1878.
Outre l'agriculture, les enfants
étaient
employés à diverse activités exploitant les
richesses naturelles de l'île. Les
fruits des arbousiers étaient récoltés pour
être distillés, les souches de
bruyère servaient à la fabrication des pipes. On y
pratiquait l'apiculture et
la colonie disposait d'un four à chaux et d'un four à
briques.
Les conditions d'existence
étaient draconiennes.
Les jeunes enfants, agés de treize à vingt ans, se
plaignaient notamment du
manque de nourriture.
Un évènement
particulièrement grave, une
véritable catastrophe, surviendra au cours de l'année
1866.
En effet, le 28 septembre 1866, 65
enfants
provenant de la colonie
horticole de Saint Antoine de Castelluccio à Ajaccio
débarquaient sur l'île
du Levant. Cette colonie venait de fermer ses portes et
le pouvoir avait décidé de déporter certains des
jeunes enfants sur le
continent.
Leur arrivée, portant
l'effectif de 223 à 288
détenus, avait été précédée
d'une réputation que les faits n'allaient pas
tarder à confirmer. Dès les premiers jours, les nouveaux
arrivants se
plaignirent de la nourriture et des horaires de travail trop long.
Ainsi, le 2 octobre, à la
tombée de la nuit, des
chants séditieux précédèrent la
révolte. On éteignit les lampes, on brisa les
vitres et les cloisons du dortoir. On se proposa d'aller piller la
demeure du
Comte, absent ce soir là. On décida d'aller
libérer les prisonniers. Armés de
haches et autres outils les révoltés
défoncèrent neuf cachots. Plus tard, il
fut décidé de châtier les espions au nombre de 13
ou 14.
Malheureusement certains enfants
avaient pillé
le magasin aux vivres et avaient consommé l'alcool
entreposé. C'est alors que
l'un d'eux, sur ordre d'un des meneurs, mit le feu au batiment qui ne
tarda pas
à s'embraser.
Entre
temps, les neuf gardiens avaient fui. Le
Directeur, sa famille et l'aumonier s'étaient
éloignés sur un bâteau.
L'incendie se propagea dans le
pénitencier et
dura jusqu'à l'arrivée des militaires du 9ème régiment
d'infanterie et de deux
brigades de gendarmerie, le 4 octobre au matin. La chasse à
l'homme se poursuivie
sur l'île. 37 jeunes furent arrêtés,
embarqués sur le vapeur "Hector"
et évacués vers la maison d'arrêt de Toulon.
Les médecins
légistes eurent du mal à dénombrer
les victimes. On ne sut jamais si 13 ou 14 enfants périrent dans
cet incendie.
Le procès dura du 2 au 6
janvier 1867. Les 16
accusés, agés de treize à dix-neuf ans, furent
condamnés à des peines diverses,
dont quatre d'entres-eux aux travaux forcés à
perpétuité. Le tribunal avait
répondu oui (unanimement) à l'existence de circonstances
atténuantes !
Quatre années plus
tôt, dans la nuit du 29 mai
1862, un jeune corse fut
impliqué, lui aussi, dans une révolte. Il
s’agissait
de M. X, âgé de 16 ans, originaire de Centuri, dans le Cap Corse La terrible
nuit se termina par l’assassinat d’un jeune garçon
détenu. Les causes de la
mutinerie trouvaient leur origine dans les mauvais traitements
infligés aux
enfants.
Le 31 juillet de la même
année, le procureur
Impérial renverra 9 jeunes garçons répondre de
leurs méfaits devant le tribunal
correctionnel de Toulon.
Un jugement fut rendu le 9 août 1862.
Pour sa défense, M. - dont
nous aimerions savoir
ce qu’il est devenu par la suite - invoqua : "Je n'ai rien vu, je n'ai
rien cassé ... J'ai mangé des pommes de
terre" !
Jacques
DENIS