Sitôt après
l’attaque dans la nuit du 21 au 22 mai 1808 de la caserne de
gendarmerie de Prunelli di
Fiumorbo, deux compagnies militaires sont
dépêchées dans le Fiumorbo par Morand, le
général commandant en chef .
Le 1er juin 1808, le
général Morand
fait comparaître à Isolaccio
di Fiumorbo le maire Filippo
Francesco Valentini.
Le capitaine François
Bonelli fait procéder à un appel nominal de la
dizaine de coupables que le maire aurait désigné…
Tous sont absents.
Le 5 juin 1808, le capitaine François
Bonelli ordonne un rassemblement
de tous les hommes du village d’Isolaccio. Un nouvel appel
nominal est
effectué. Les 150
hommes présents, dont le maire, Filippo Francesco Valentini et
le juge de paix, Carlo Giovanni
Laurelli, sont enfermés dans
l’église
[Il s’agit en fait de la chapelle
San Roccu puisque l’église actuelle
n’était
pas encore construite].
Les 150 prisonniers sont alors
conduits et emprisonnés à Corte puis à Bastia.
Parmi les 150, 34 hommes (pour
mémoire 8 hommes ont pris le maquis et ne sont pas
emprisonnés), sont désignés pour
comparaître et être jugés par une commission
militaire
spéciale de la 23E division militaire [Comme
bien
souvent dans l'histoire de la Corse
il s’agit d’un échelon judiciaire exceptionnel du
droit commun].
L’état nominatif des
individus du canton du Fiumorbo,
arrêtés le 5 juin
1808 porte en titre l’accusation : prévenus
« 1° d’avoir été, de tous
temps, les auteurs et les fauteurs de révoltes et insurrections
dans le canton,
2° de s’être rendus coupables de vols et brigandages
à main armée sur les
routes 3° d’avoir fait feu en rassemblement sur la
gendarmerie impériale dans
la nuit du 21 au 22 mai précédent, cantonnée dans
la ville de Prunelli ».
Tous les hommes incriminés
sont originaires du Fiumorbo.
Au même moment à Bastia, 34
arrestations supplémentaires sont
opérées au sein du 1er
bataillon des chasseurs du Golo.
L’état nominatif
dressé par l’autorité militaire indique que les
militaires en question ont été désarmés sur
ordre du général en chef Morand.
L’acte d’accusation
les concernant stipule qu’ils « allaient
exécuter leurs projets de désertion avec armes et bagages
et suivre
quelques-uns de leurs camarades qui étaient allés prendre
par t au mouvement
insurrectionnel qui a eu lieu dans le canton du Fiumorbo dans la nuit
du 21 au
22 may dernier, et dont la majorité sont d’ailleurs
prévenus de délits
graves ».
Ces militaires, sous officiers et
chasseurs pour la plupart originaires du Fiumorbo,
appartiennent à la 1ere
et 2eme compagnie des chasseurs corses
du Golo.
Les 34 militaires sont
incarcérés à l’île d’Elbe,
[vraisemblablement à
la caserne de la Linguella
de Portoferraio]
où ils ont
été acheminés par la goélette
Red Bridge, qui était en rade de Bastia du 14 au 18 août
1808 [L’appareillage
du navire à bonne date a été empêché
par des navires Anglais].
Le Red Bridge est en
rade de Portoferraio
le 20 août 1808.
Martinetti, fils de
l’ancien
juge de paix, est arrêté. Le capitaine Thomas Sabini,
commandant militaire du Fiumorbo
de la 1ere Compagnie du
bataillon
du Golo fait
libérer Martinetti.
Le général Morand
est à Vivario
où il convoque Sabini.
Ce dernier se
fait accompagner par 30 paysans armés. Le général Morand fait
arrêter Sabini.
Le 22 juin 1808, Sabini est
condamné à mort par une commission militaire.
Le jugement est confirmé le
lendemain, 23 juin 1808. Le même jour est
publié un arrêté du général Morand
qui fixe la composition du tribunal
militaire qui se réunira le 4 août 1808. Cette commission
militaire spéciale
est chargée de juger les 34 accusés.
Le 24 juin 1808, Sabini est
exécuté sur la place de Corte.
Le 10 août 1808 à Saint-Florent,
les condamnés présents non
exécutés à la suite du procès de la
commission militaire sont
embarqués
sur le navire La Danaé
où ils rejoignent les 124 autres emprisonnés
d'Isolaccio qui n'ont pas
été
déférés en justice. Le 11 août 1808, le
navire
appareille pour Toulon.
A Toulon, 5 prisonniers sont
incarcérés dans les prisons civiles, ce du 1er
au 28
septembre 1808. Ce sont le maire, Valentini Filippo Francesco, Colombani
Ferdinando, Giacomini
Giacomo, Valentini
Marsilio et Valentini
Angelo
Luigi.
Les autres déportés
auraient-été emprisonnés à la Tour-Royale de Toulon
connue pour être un lieu d'enfermement extrêmement
difficile.
Entre la fin du mois de septembre
et le début du mois d'octobre 1808, tous ont
été acheminés par la voie terrestre
jusqu'à Aix-en-Provence,
ville distante de 90km de Toulon,
puis
la ville d'Embrun
située à 180km d'Aix-en-Provence.
A Embrun, les
déportés ont été enfermés dans la
première maison de force et de détention ouverte en France en
1805 et considérée comme une
« Œuvre considérable de Napoléon
Bonaparte ».
Le 16 décembre
1808, 24
décès ont déjà été
enregistrés. 133 prisonniers survivent.
Quinze jours plus tard, en date
du 31 décembre 1808, il est fait état de 16
autres décès, ce qui porte le nombre de survivants
à 117.
Les décès
s'accélèrent : à la fin du 1er
trimestre 1809 sont ajoutés 71 nouveaux
décès. Il ne reste que 46 survivants.
A la fin du 2e
trimestre 1809, on comptabilise 13 autres décès et
seulement 35 survivants.
Au mois d'août 1809, 5
prisonniers sont en surveillance dans le département du Vaucluse et 30 autres
sont en
surveillance dans le département de la Drôme.
Dans la Drôme, au mois de
mars 1810, 2 prisonniers sont décédés. 28
survivent.
Dans ce
département, le 23 avril 1810, le sous-préfet de Nyons
fait état de 11 évasions. 2 évadés
sont repris immédiatement. Les 9 évadés sont
: Alessandrini Grazio,
Bartoli
Salvadore, Gambotti Ferrando, Giudicelli Orso Matteo, Leandri Giacobi,
Peraldi
Pietro Antonio, Pietri Giulio Pietro, Pietri Giuseppe et Vittori Giovan
Santo.
Par la suite, quelques uns seront
arrêtés dans le département du Var. A
peu près au même moment se produisent 2 évasions
en Avignon. Ce
sont Carlotti Giabiconi
et Defendini Angelo Brando.
A la fin de
l'année 1810, 6 autres prisonniers sont
décédés dans la Drôme. Il y a 22
survivants.
A la même époque,
alors que des informations font état de libérations (ce
qui ne signifie pas un retour en Corse),
le
général Morand
refuse de laisser rentrer en Corse
les survivants pour « ne pas introduire de
nouveaux éléments de trouble ».
Au 28 février 1811 sont
comptabilisés dans la Drôme 7 autres
décès ce qui porte le nombre de survivants
à 15, parmi lesquels sont Colombani Don Andréa,
d’Isolaccio et Domenico Dominici.
Les rapports de
l'administration indiquent qu'ils sont manoeuvres, domestiques ou
laboureurs et qu'ils se conduisent bien.
Le 2 mars 1811 dans le
département du Vaucluse, 3
prisonniers sont
décédés et il ne reste plus que 2
survivants : Pierre Xavier
Paoli, dont
le frère et 20 de ses
cousins sont morts, et Pierre
Jean Defendini qui a perdu 3
fils et plusieurs parents.
Dans le département de la Drôme,
sur la quinzaine de survivants, un prisonnier est
employé à la préfecture ; un autre est
occupé chez le
secrétaire
général ; un 3e travaille chez le
maître de
la poste aux chevaux. Un d'entre eux s’est
marié à Montélimar.
Mais, le 17 novembre 1811, 4
décès sont annoncés. Il reste 11 survivants.
En 1812, 7
évadés sont repris par des douaniers à Golfe Juan.
Et, en date du 3 janvier 1814 dans
le département du Vaucluse
il est fait état de 2
survivants.
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